METAMEC

Métamec

Extrait du Journal VINYL
"Musique Hors Bizness"
Alain RIVED - Juin 2000

Le journal de la "Musique Hors Bizness", comme il aime à se nommer, nous offre un superbe et émouvant article sur le dernier disque de Léo. Nous vous en donnons quelques extraits. Merci encore à Alain RIVED d'avoir su transcrire ce que nous avions au fond du coeur.
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" Léo Ferré s'en est allé, Léo Ferré revient. Il nous avait prévenus, dans Et... Basta ! "Moi, j'ai cent mille ans, c'est pas pareil! Je suis un mort en instance, et je vous regarde." L'an 2000 nous apporte un insigne cadeau ! Le nouvel album que l'artiste préparait, dont il reste, parmi les 17 titres prévus au départ, 9 rescapés que Matthieu Ferré a consciencieusement exhumés pour notre plus grand bonheur. L'objet est un chef-d'oeuvre. Métamec, aux superbes photos d'André Villers, propose un livret de 64 pages où sont inscrites les paroles des chansons. Mieux que "chansons", dont le sens peut paraître restrictif, il s'agit là de messages.

Métamec, Souviens-toi, lecteur, du fabuleux Epilogue de l'Opéra du Pauvre, où Ferré donnait, sur fond de percussions, la définition de ce néologisme : "Je détrousse des mecs au fond des mers luisantes, et ils deviennent des métamecs, au-delà du mec !" La version retenue dans le présent album est récitée sur la musique originale du Bateau Ivre. Ferré envisageait bien dans son projet initial, la composition d'une autre musique, que nous ne connaîtrons peut-être jamais, à moins que, Matthieu aidant... Nous savons que cette composition nouvelle était à l'état d'ébauche. Reste le texte en lui-même, sa construction savante, avec thème et variations. Pas moins de 99 strophes, soit 396 alexandrins contenus dans une plage de 18' 04 ! De quoi décourager la radio la plus conciliante ! D'autant que rien ne peut être retranché de ce texte à la poésie unique, profonde, drue, féconde et redoutable. Le thème, déjà, que l'auteur développe dans ses variations en en reprenant chaque alexandrin, est un véritable creuset d'injonctions : Regarde, Ecoute, Goûte, Caresse, Entends, Prends, Remplis, Chante, Vois, Mets ! Ce sont les 10 commandements du prophète Léo Ferré qui préconise, post-mortem, son inépuisable recette du bien-être (car il n'est pas question de bonheur, dont Ferré connaît trop bien la fragile existence).

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Zaza est à priori le moment le plus intime de cet album. Après Pépée, Léo décide de régler ses comptes et parle à travers Zaza, en des termes qui ne laissent planer aucun doute sur le drame du 7 avril 68 à Gourdon. Ferré prête sa voix au chimpanzé qui a payé de sa vie la souffrance d'une femme que nous nous garderons bien de juger ici. "Zaza les bras en croix" doit rester une chanson sur l'inanité du bonheur. Et paradoxalement, il y a un indiscutable bonheur dans la façon dont Ferré interprète ce texte, sur fond de piano roulant.

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On saluera ici l'authenticité d'un album où Léo nous paraît plus présent que jamais.

Sois heureux, Métamec !, sois heureux !"

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