Léo Ferré - Le médicament Léo

Le médicament Léo

préface du livre "Numériquement Ferré" aux Éditions "D3 de Beyrines"

Les intellos disent Ferré.
Les autres disent Léo.
Léo ! L’éleveur de mots, l’homme qui domestique les orages et nous les offre couchés sur une partition. Peu de gens le savent mais Léo est un médicament. Il est celui qui nous fait nous sentir vivant « et même très vivant » comme me le disait un jour une québécoise.
Les jours de spleen, ces jours affreux quand la merde « déborde », il y a Léo, toujours, et ça n’est pas rien. Léo avec le grain de sa voix, le muscle de son verbe.
L’écouter, c’est prendre une carte d’embarquement, destination bonheur.
Beaucoup ne l’apprécient pas.
Tant pis pour eux.
Et pour nous, qui l’aimons, cette désaffection est une chance. Nous savons que les familles nombreuses ont toujours eu quelque chose d’étouffant.
Avec Léo, pas de dilution dans le grand nombre, aucune unanimité possible. Léo, on se le garde bien au chaud, rien que pour nous, comme un enfant serre un nounours contre son cœur.
Mais, tout de même, il n’est pas (encore) interdit de se poser des questions.
Comment rester insensible devant son œuvre, une œuvre qui vous nettoie l’âme et vous l’essore ainsi qu’un linge dans une machine à laver ?

Allez, dis-moi ce qui te fait pleurer et je te dirais si nous nous ressemblons.
Léo nous accompagne tous les jours, invisible et discret comme une deuxième ombre, comme un ange en rupture de banc, un ange débarrassé du Patron, un ange qui gueule comme un beau diable. Pour nous. Pour vous. Pour toutes celles et tous ceux qui le méritent, c'est-à-dire ceux et celles qui ont un cœur dans la poitrine… et pas seulement une pompe sanguinolente.

Les radios et télévisions continuent de nous encombrer la tête avec des chanteurs inconsolables, souriants et polis. Léo, lui, continue son bonhomme de chemin dans nos tripes.
Sans GPS ni marketing.
Oui, Léo est un médicament, un remède remboursé à l’asocial-sécurité.
Pas d’ordonnance. Aucune posologie.

Dis, t’as pris ton Léo ce matin ?

Non, j’attends ce soir. Moi, j’préfère la nuit.

Comme tu veux...

Liberté totale.
Merci Léo.

Frantz Vaillant
Juillet 2008
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