Léo Ferré - Hommages

Hommages à Léo Ferré
1993

JACQUES HIGELIN : Chanter, c'est donner

Dire que c'est un grand poète ? Tout le monde le sait...
Pour moi, c'est un beau vivant. Un symbole de l'amour, du respect de la vie, de l'amour et de la mort.
Il est mort, oui. Je ne m'apitoie jamais sur la mort, elle est naturelle et Léo le savait.
C'est pourquoi il dispensait sa vie à profusion, qu'il donnait à tous avec une énorme générosité.
Un homme qui chante est un homme qui donne.

Il a disparu, il reste. Tant que les gens auront des oreilles pour l'entendre et leur coeur à l'écoute, ils retrouveront ses musiques et ses phrases. Il faut écouter les poètes. Ce sont les seuls qui ne trichent pas...
La voix de Léo, les vers de Léo, les cris de Léo, je les garde en moi. Parce qu'il m'a montré le chemin du courage, de la dignité d'être un humain. Parce qu'il m'a appris la noblesse d'aimer.

Le nouvel observateur 22 - 28 juillet 1993

MICHEL JONASZ :

J'ai entendu un jour à la radio L' île Saint-Louis. Pour la première fois, je me suis mis à chanter, en imitant sa voix. Il ne m'a plus jamais quitté. Je revenais toujours à lui.
Ce que j'aimais le plus, c'était sa déchirure. On l'entend dans sa voix - la voix, c'est vraiment ce qui caractérise un être humain. Il y avait une émotion, dans la sienne... l'émotion pure. Quand tu entends ça, cette vibration derrière les mots, quelque chose, exprimé ou pas, caché ou pas, te déchire aussi. Je ne sais pas ce qu' il cachait, lui, derrière ses fureurs ; je sais que sa gueule, sa colère, sa révolte, sa folie n'ont jamais menti. Son chant nous menait loin, sans balisage possible ; lui-même n'arrivait pas à expliquer ses textes. Est-ce qu'on a besoin d'un mode d'emploi pour aimer La mémoire et la mer ?

Article : "Leur dieu, leur maître", Télérama du 28 juillet 1993

BARBARA :

Je l'ai vu débuter aux Assassins, j'ai eu le bonheur de chanter ses chansons, d'exister en même temps que lui. J'espère qu'il est parti sans souffrance, dans la solitude désirée, près de ceux qu'il aimait. Je ne suis pas sûre qu'il aurait voulu nous entendre, m'entendre parler de lui. Ces choses-là, peut-être, lui auraient fait plaisir de son vivant. Maintenant, que dire ? Chercher, nous qu'on interroge quand l'un de nous s'en va, une phrase importante à propos de quelqu'un qui l'était plus que nous ? Ca me met en colère, ça.
Pour changer...

Article : "Leur dieu, leur maître", Télérama du 28 juillet 1993

BERTRAND CANTAT :

Le vieux lion solitaire qu'il était correspond bien à l'homme libre, intégralement libre, qu'il passait son temps à devenir. Pour des gens comme lui, ça ne veut plus rien dire d'être dans le tumulte de la vie et des choses.
Alors ils brillent dans leur solitude.
Ce qui est intéressant, c'est qu'un type de cet âge et de cette génération nous ait influencés autant que le rock que nous aimons. Il est le trait d'union entre les poètes du XX ème siècle et tous ces groupes trentenaires d'aujourd'hui, qui se sont abreuvés à ce genre de source. Léo, c'était le "grand au-dessus".
De lui, finalement, je retiens l' homme libre, libre de tout. Cette faculté à tracer sa propre route, presque rageur. Et cette poésie qui ,quand elle se mettait à partir loin, ne pouvait plus s'arrêter.

Bertrant Cantat est le chanteur du groupe Noir Désir;

Article : "Leur dieu, leur maître", Télérama du 28 juillet 1993

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